SOUL ON FIRE: LA VIE ET L’ŒUVRE DE PETER STEELE

mercredi/04/11/2015
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PeterSteele

 

Auteur : JEFF WAGNER (NICOLAS CASTELAUX, trad.)

Livre : SOUL ON FIRE : LA VIE ET L’OEUVRE DE PETER STEELE

Editeur : CAMION BLANC

Date de sortie : FEVRIER 2015

Note : 16/20

 

 

Sorti en février 2015, c’est avec un peu de retard que « Soul on Fire : la vie et l’œuvre de Peter Steele » atterrit dans la Art Zone. Et l’essentiel est que tant ce retard, que le peu d’écho médiatique que cet ouvrage a eu lors de sa sortie en France soient, quelque peu, réparés. « Réparer », un des trois mots, avec « entretenir » et « améliorer », qui composaient la devise du Vinnland, la contrée imaginaire que Peter Steele aurait voulu ériger en référence au nom donné par les vikings au continent américain vers l’an 1000, et dont le drapeau croix scandinave verte et noire ornait le dos des disques de Type O Negative, ainsi que les décors de leurs concerts. Steele disait plus précisément : « Il faut tout d’abord s’occuper de ce qui doit être réparé. Puis entretenir les choses qui doivent l’être. Et quand tout cela sera fait, commencer à améliorer les choses ».

L’origine de cette devise pétrie de bon sens, ainsi que celle des deux couleurs de ce drapeau, nous est révélée dans « Soul on Fire », lorsque Peter Steele était employé aux Parcs et Jardins de New York City, il était vêtu d’un uniforme vert et noir. Le gigantesque chanteur-bassiste aimait ainsi trouver un équilibre au contact de la nature, entre deux concerts donnés dans son Brooklyn natal et alentours, tout en aidant utilement son prochain. D’ailleurs, il cumula le plus longtemps possible les deux métiers, et ne démissionna qu’en 1995 à l’entame d’une tournée avec Mötley Crüe. Très « Public Service » tout ça. Un paradoxe, pour un parolier plus que décrié par certains bien-pensants, suite à certains textes provocateurs anti-Welfare.

Que l’on soit fan ou on de Peter Steele, il est permis de rester pantois quant à la grande contradiction que fut son existence. Ou plutôt, quant à la somme de contradictions que celle-ci cumula. Un Hercule au visage froid, une force de la nature, mais affublée d’une sensibilité à fleur de peau, dont le mental fragile ne survécu guère au décès de sa Mère en 2005. Un grand sportif, adepte de la fonte jusqu’au milieu des années 1990, et férocement anti-tabac, qui sombra dans la drogue, et dont l’état de santé plus que délabré provoqua le lamentable décès il y a cinq ans. Une grande figure de la musique des années 1990 (le groupe Type O Negative ayant été bon vendeur de disques Outre-Atlantique et dans le Nord de notre continent), qui finit dans un parfait dénuement parmi ses chats, incapable d’obtenir un crédit afin de racheter la maison de ses parents ni de se payer plusieurs mois de rehab. Un obsédé sexuel, ayant une groupie dans chaque port, mais qui ne se remit jamais de la rupture avec sa promise et de n’avoir jamais eu d’enfant. Un authentique timide, capable de poser nu et en érection dans Play Girl. Un artiste exigeant avec lui-même et les autres, fasciné par la série « New York Police Judiciaire » (il en regarda un épisode alors qu’il était déjà à l’agonie). Un réac’ aimant le désordre. Un gentleman obscène. Un gothique fan des Beatles et de Manowar. Un déçu du genre humain altruiste. Un catholique fasciné par l’URSS. Un blagueur scatophile dont le colon explosa…

Inutile de revenir ici sur tous les épisodes de la vie de Peter Ratajczyk. Ne serait-ce parce que comme toute bio du genre, il y a un début et une fin. Pourtant ses débuts ont été anormalement longs (il en fit une dépression). Longs mais créatifs, avec Fallout puis avec Carnivore (on apprend que Phil Anselmo ainsi que la scène de la Nouvelle-Orléans vénèrent ce combo méconnu). La somme est divisée en trois parties, une couleur par période (ils connaissent Krzysztof Kieślowski aux USA ?) : rouge, vert et noir. Rouge est l’enfance puis l’adolescence, jusqu’à la fin de Carnivore (1989). Vert est la création pus l’apogée de Type O Negative. Noir fut la couleur de la décadence et de la mort.

Même si les autres membres du groupe ont refusé de s’associer au travail de Jeff Wagner, et que certains fans ont regretté l’absence de véritable information nouvelle, ladite bio est riche. Pour tout dire, on ne s’ennuie jamais, tant la destinée de ce mélange singulier entre Jim Morrison, Raspoutine, et Patrick Dewaere est attachante et rendue comme telle par l’auteur. Par ailleurs, on apprend beaucoup sur le processus créatif de l’ensemble des albums que le colosse aux pieds d’argile a réalisé, « Bloody Kisses » en tête. Autre point intéressant : l’existence de Petrus Steele (et de ses groupes) est restituée dans le contexte et l’actualité de chaque époque. Entre autres : les émeutes en Allemagne en 1991, le 11 septembre 2001, la crise du skeud des 2000’s et l’éruption du volcan Islandais Eyjafjallajökul le 14 avril 2010, soit le jour-même de sa mort. Encore un clin d’œil de du destin, à celui qui prétendait avoir des origines Islandaises… alors qu’il en avait en fait des Françaises.

Justement, et élément assez rare pour être signalé, en sus de la préface de Jeff Wagner, des remerciements, et des notes, notre livre contient un « Epilogue à l’édition française », intitulé « Peter Steele, ma vie, son œuvre ». Il est rédigé par le traducteur, Nicolas Castelaux, lequel raconte sa rencontre avec le Géant vert lors d’un concert en Suède en 2003 (plus la genèse de son tatouage Carnivore en Pologne, treize ans plus tôt), ainsi que son admiration pour le bassiste triste (il avait commencé à plancher sur un projet de livre, avant que le ricain ne lui grille la politesse). Le propos est fan, et assumé, tout comme la peinture qu’il a faite de Steele et ajoutée en page ultime de l’édition Française (ahem…). Mais ce n’est que modeste récompense, au vu de la somme de travail que la traduction dans la langue de Nicola Sirkis a du représenter. A ce propos, en dépit de quelques critiques postées ici et là sur la toile par certains fans Hardcore, et en faisant abstraction de menues coquilles dans le corps de texte (« descendants » à la place d’« ascendants », la « bière au gingembre » à la place de la « Root Beer », plus une ou deux fautes de conjugaison…), sa traduction est correcte et les 623 pages formant l’ouvrage sont agréables à lire.

En définitive, tant pour des raisons inhérentes à la vie de Peter Steele, que le sérieux du travail de(s) (l’)auteurs(s), « Soul on Fire » s’avère hautement recommandable. Et pas uniquement aux seuls dévots du Goliath vert fluo et aux fans du genre (quel genre d’ailleurs : Metal ? Goth ? Doom ? Sludge ? Pop ?) popularisé par cet ovni sombre et unique que fut Type O Negative.

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