SUBSTITUTION – BRING HER BACK

mercredi/06/08/2025
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En 2022, les frères Philippou (qui, il faut le dire, ont un nom bien trop mignon pour faire de l’horreur) ont impressionné leur petit monde avec leur premier film, La Main, un film d’horreur surnaturelle aux quelques images cauchemardesques. Personnellement, j’ai trouvé que c’était un film sympathique, un peu surestimé, mais qui se défendait bien. Forts de ce succès, ils ont donc décidé de retrousser leurs manches pour proposer un deuxième film bien plus méchant, hardcore et psychologiquement éprouvant. Autant vous dire qu’ils n’ont pas fait semblant : ils signent l’un des meilleurs films d’horreur de l’année — voire même un sérieux concurrent au chef-d’œuvre d’Ari Aster, Hérédité !

Tout commence lorsqu’un adolescent, Andy, au passé compliqué, et sa petite sœur aveugle, Piper, doivent quitter le nid familial à la suite du décès de leur père. Ils sont alors hébergés par Laura, qui les accueille à bras ouverts… surtout Piper. Très vite, son comportement devient de plus en plus énigmatique…

Je m’arrête ici pour le synopsis, car il est vraiment important d’en savoir le moins possible pour savourer pleinement le choc que Bring Her Back vous réserve. Déjà, l’un des plus grands points forts du film, c’est son casting solide et ses personnages. Le duo principal ressemble ENFIN à de vrais adolescents, et non à de jeunes adultes grimés en ados. Mais c’est surtout la fantastique Sally Hawkins (La Forme de l’eau, Godzilla 2014), qui interprète une mère de substitution à la fois chaleureuse et inquiétante, qui va littéralement crevée l’écran. Un rôle très complexe qu’elle maîtrise parfaitement, d’autant qu’elle n’est pas une habituée du genre. Je dirais même que c’est elle qui incarne le personnage le plus tiraillé, et donc le plus intéressant. Petite mention spéciale également à Sora Wong, qui incarne Piper — son tout premier rôle au cinéma — et qui souffre réellement de malvoyance, ce qui donne une authenticité supplémentaire à la production. Et je me dois de citer l’interprétation complètement hallucinante de Jonah Wren Phillips qui, vu son jeune âge, devra sans doute faire quelques séances de thérapie, tant c’est lui qui porte les scènes les plus dérangeantes.

Autre atout majeur du film : son ambiance angoissante et oppressante, renforcée par une atmosphère moite. C’est bien simple : il pleut tout le temps. La pluie s’infiltre partout, tout est humide, trempé, comme si elle était elle-même un personnage du récit. Et surtout, la mort plane sur tout le film. Présente dès l’introduction, elle suit les personnages de près, impossible de s’en débarrasser, notamment au travers des thèmes abordés : la violence familiale, la maltraitance, et surtout le deuil — ou plutôt l’incapacité à faire son deuil, à rester bloqué dans le passé. Le film regorge de symboles, notamment un cercle récurrent, qui peut avoir plusieurs interprétations, ainsi qu’un parallèle avec les yeux. Et quand on sait que les yeux sont les miroirs de l’âme… disons simplement que cela donne encore plus de matière à réflexion. Mais chut, pas de spoiler !

Les frères Philippou font également appel à la body horror pour nous la balancer en pleine face, notamment à travers une scène centrale qui en retournera plus d’un. On n’est pas dans de la mutation façon Cronenberg, mais plutôt dans les sévices et l’automutilation. Rien n’est épargné, tout est montré, avec une cruauté et un sadisme extrêmement visuels, portés par le travail formidable des maquilleurs. Les réalisateurs ont trouvé le parfait équilibre entre l’envie de détourner les yeux… et celle de continuer à regarder, pris dans un voyeurisme morbide. Par ailleurs, le film intègre quelques scènes en found footage au rendu VHS abîmé, qui viennent enrichir le lore sans casser le rythme, tout en ajoutant une nouvelle couche d’angoisse fascinante.

Au final, Bring Her Back est sans conteste l’un des meilleurs films d’horreur de l’année (jusqu’à présent), grâce à son ambiance travaillée, ses personnages riches et complexes, ses séquences violentes et douloureuses, et les multiples thèmes qu’il aborde : la mort, le deuil, la douleur psychologique… Le tout est porté par une mise en scène efficace, qui sait prendre son temps sans jamais ennuyer, pour mieux nous exploser à la figure. En tout cas, retenez bien leur nom, car s’ils continuent sur cette lancée, les frères Philippou sont bien partis pour devenir de très grands noms de l’horreur.

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