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Interview avec Michael Monroe

dimanche/22/09/2019
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Un mois pile avant la sortie de son album « One Man Gang », nous avons rencontré le virevoltant Michael Monroe, le vétéran et légende du Rock’n’Roll, pour un entretien des plus interactifs et truculents, lors de son passage au Hard Rock Café de Paris.

 

 Michael Monroe : Beau t-shirt mec ! (NDA : Keith Richards, 1973)

Art N Roll : Merci. Le titre de ton dixième album solo…

MM : Tu parles de quel album ?

ANR : « One Man Gang »…

MM : Ouais…

ANR : …pour vingt-cinq enregistrements que tu as réalisé au total depuis 1981, et qui sort le mois prochain…

MM : Le 18 octobre !

ANR : …aurait quelque chose d’oxymorique… A première vue, c’est un album solo de Michael Monroe, mais son groupe, composé de fortes individualités, est bien plus qu’un simple Backing Band d’accompagnateurs, non ?

MM : C’est un groupe ! J’aurais très bien pu enregistrer tout moi-même, y compris les parties de batterie, mais j’ai choisi la formule du groupe. A la différence que ce groupe porte mon nom à moi. « One Man Gang » est un titre parfait pour un album, et Michael Monroe est également un bon nom de groupe, il est assez réputé désormais… J’ai appelé mon combo comme cela vers 2010, et il a fallu deux-trois ans pour que le public intègre le fait qu’il s’agit d’un groupe et non de moi tout seul… Les musiciens qui le composent possèdent beaucoup de créativité et de talent, et j’aime collaborer avec eux….

MM : (NDA : s’adressant à la photographe) Tu vas prendre des photos pendant tout l’interview ?!?

ANR : Pardon ?

MM : Elle prend des photos, et je ne peux pas me concentrer… (NDA : s’adressant à la photographe) Attends la fin de l’entretien, tu en as déjà quelques-unes là, il faut que je lui parle maintenant, on fera les photos séparément… Merci beaucoup !

ANR : La pochette du disque fait très « Gang » : cinq types vêtus de noir marchant dans un couloir souterrain du métro ou d’une gare…

MM : C’est une gare…

ANR …et toi au centre. Cette photo s’inscrit dans une très longue tradition graphique de couvertures, celle des Stones de « December’s Children »…

MM : (NDA : Subitement très concentré) Hein, hein…

ANR : …celles des Dead Boys…

MM : Yeaaaaaaaaaaah !

ANR : …celles des trois premiers disques des Ramones, celles de Johnny Thunders & the Heartbreakers : une bande dans la rue…

MM : Lorsqu’on a commencé Hanoi Rocks (NDA : son premier groupe de 1979 à 1985) moi, Nasty Suicide et Sami Jaffa avons vécu six mois dans la rue, un groupe est né de cette complicité, et il existe encore quarante ans après, puisque Sami Jaffa fait partie de mon Combo et que Nasty Suicide joue de la guitare sur cet album : c’était vraiment nous contre le reste du Monde ! Nous contre le reste du Monde, c’est l’histoire de ma vie ! (NDA : il se lève du canapé, ôte ses lunettes de soleil, plie sa veste et la dépose soigneusement sur un cintre tout en parlant) C’est toujours plus courageux d’être à son propre compte, le sujet de « One Man Gang » n’est pas de rejoindre un groupe déjà établi, mais de le constituer. Il faut avoir des couilles pour créer son propre groupe ! Pour revenir à la couverture de ce disque, tu remarqueras tout de même que nous ne posons pas devant une barrière ou un mur, contrairement aux groupes que tu as cités (Rires)

ANR : C’est Helsinki, la gare ?

MM : Je ne me souviens plus, c’est une idée de Rich Jones, notre second guitariste, qui avait repéré les lieux. C’est un souterrain de gare, un endroit parfait pour cette photo de couverture… C’est Rich Jones qui a également créé notre logo, regarde… (NDA : il montre un ensemble de croquis sous pochette plastifiée)

ANR : Un logo avec un éclair, on ne peut faire plus classique…

MM : Ouais, et avec la tête de tigre à l’ancienne… Je l’ai également imprimé au dos de ma veste en cuir… Tous les groupes devraient faire ça, et le mettre au recto de leurs pochettes de disques, cela fait « uniforme », cela donne l’impression d’un Gang…

ANR : …Comme Iggy & the Stooges, la photo au dos de la pochette de « Raw Power »…

MM : Ouais, exactement !

ANR : Est-ce que cette pochette est une référence à la chanson « Last Train to Tokyo », un des temps forts de ce disque ?

MM : Oh non ! Ce n’était pas intentionnel ! Tiens, cela me fait penser quand Hollywood Vampires avait joué « Train Kept a Rollin’ » à Tokyo en 2016…

ANR : …Je vais voir Alice Cooper après-demain…

MM : Waoh ! Où ça ?!?

ANR : Une nouvelle salle non loin de Paris (NDA : La Seine Musicale)

MM : Cool ! Alice Cooper tout seul à son compte, ou Hollywood Vampires ?

ANR : Alice Cooper…

MM : C’est le meilleur…

ANR : Vous êtes cinq : Sami Yaffa, Steve Conte, Rich Jones, Karl Rosqvist, et toi : c’est le chiffre idéal pour un groupe de Rock’n’Roll, non ?

MM : Tu me parles en termes de numérologie ?

ANR : Non, c’est une question portant sur la formule choisie, le groupe à deux guitares ?

MM : Deux guitares, ouais ! Bien sûr, je pense aux Rolling Stones, deux guitares. Dans mon précédent projet, « Demolition 23 », le regretté Jay Hening était l’unique guitariste : il incluait beaucoup d’accords dans ses soli afin de palier l’absence de guitariste rythmique et afin d’occuper tout l’espace (NDA : il chantonne un solo) Mon avis est que Nasty Suicide joue notre genre de musique mieux que n’importe quel autre guitariste, il a un côté Ronnie Wood ou Keith Richards. Et que de toutes façons, j’ai été habitué tout au long de ma carrière à jouer avec deux guitaristes.

ANR : Passons aux principaux titres de cet album… « One Man Gang », qui commence sur un cri, est un Rock’n’Roll très traditionnel, il me fait penser à « Rip this Join » des Stones, mais qui serait joué par Johnny Thunders & the Heartbreakers… 

MM : (NDA : il claque un coup des mains, et marmonne un cri puis « One Man Gang »… puis le chante distinctement, avant de reprendre son souffle) Ta comparaison est correcte. « Rip this Join » sur « Exile », est un de mes morceaux préférés des Stones. Super solo de saxophone, et tout…

ANR : A ce propos, quel est le meilleur album des Stones selon toi ?

MM : « Goats Head Soup » a été un de mes albums favoris des Stones. Et « It’s Only Rock’n’Roll » aussi peut-être… Ma chanson préférée des Stones est la dernière de ce disque, « Fingerprint File »…

ANR : Très Funky…

MM : Yeaaaaaah ! Mick Jagger assure les parties de guitare dessus, taaaaaaaaaaaan !!! (NDA : Il mime la guitare) Mick Taylor est le meilleur. C’est vraiment-vraiment cool !!!

ANR : Autre légendaire groupe Anglais : Captain Sensible, le bassiste des Damned, joue de la guitare sur le morceau « One Man Gang ». Peux-tu nous parler de cette collaboration ?

MM : Ouais. Ce groupe fait également partie de mes héros. J’aime les Damned. C’est un des meilleurs groupes au Monde. Ils sont parvenus à rester Punk tout en se développant de manière énorme au fil des années. Il y a des années de cela, je l’ai rencontré et j’ai dit : « Captain » (NDA : « I’ve Said Captain »…)

ANR : « Say Wot » ?

MM : Hein ?

ANR : « Say Wot » ?

MM : Quoi ?

ANR : Tu dis « Captain », je te réponds : « Say Wot » !

MM : Ouais ! Le titre de son Hit, sur son premier disque solo (NDA : « Women and Captains First », de 1982) Je viens de piger !!! (Rires) J’aime ce disque !!! Et bien figure-toi que j’ai une anecdote là-dessus, en relation avec mon nouveau disque. Je m’étais rendu à Londres en 2018, nous étions invités avec Captain Sensible à une cérémonie de remise de prix décernée par un Webzine Anglais à portée internationale, qui s’appelle le National Rock Review : « The Vive Le Rocks Awards », et qui avait lieu à l’O2 Academy à Islington. Les Damned ont joué « New Rose » ce soir-là, et moi j’avais fait une reprise de « Kick out the Jams » du MC5. Il y avait du beau-linge dans les coulisses et Captain Sensible m’a présenté à pas mal de monde. Il servait du thé à l’ensemble des participants, et m’a demandé si je voulais du thé : je lui ai répondu que non en chantant cette chanson, qui est la deuxième piste de son premier disque solo sur lequel tu viens de blaguer (NDA : il chante « A Nice Cup of Tea » : « When I awoke this morning / There was light all around the place… ») Epaté, Captain Sensible m’a demandé comment se faisait-il que je connaissais par cœur les paroles de cette chanson, pourtant peu connue (NDA : il continue de chantonner, façon opérette : « …Get to the bathroom mirror / Can that sight really be my face / Go downstairs, the sunshine glares / Across the welcome mat / Slippers on, must get along / To where the action’s at / And so the day breaks over motley cat and me I read the Sunday paper and have a niiiiiiiiiiiiiiiice cup of teaaaaaaaaa ? ») ce à quoi je lui ai répondu que je connaissais son album en entier et qu’il ne savait pas à quel point j’étais fan de lui. Depuis, il a accepté mon invitation et est venu jouer de la guitare sur mon disque. Lorsque j’ai annoncé aux quatre autres membres de mon groupe qu’il venait en studio avec nous pour enregistrer une chanson, j’étais plutôt fier.

ANR : « Last Train to Tokyo », le deuxième morceau, sonnerait autobiographique, notamment au vu de ta popularité au Japon : sais-tu combien de fois tu as joué, en solo ou non, là-bas en plus de trente-cinq ans de carrière ?

MM : Oui ! J’y suis allé trente fois.

ANR : J’ai recherché : le premier concert d’Hanoi Rocks à Tokyo a été donné le 30 janvier 1983 dans une salle du quartier de Shibuya… T’en remémores-tu ?

MM : Shibuya ? J’aurais pensé 1982…

ANR : Oui, dans une salle de Shibuya…

MM : Le Shibuya Kōkaidō, une salle de théâtre… Oui, je m’en souviens, nous avons joué devant deux-mille personnes, et c’était retransmis à la télévision Japonaise. Je crois y être revenu pour y donner un concert, en 1992, au moment de mon projet « Jerusalem Slim ». Je ne l’aimais pas d’ailleurs, et j’ai annoncé aux spectateurs : « N’achetez pas ce disque il craint ! ». D’ailleurs, nous n’avons joué qu’un seul titre de cet album, « Teenage Nervous Breakdown », ce qui est dommage, car Ian McLagan nous avait fait l’honneur de jouer dessus…

ANR : Ian McLagan ?

MM : Oui, le pianiste des Faces…

ANR : Cette collaboration à l’air assez intéressante, au regard notamment de tes influences… Les Faces étaient à moitié Mod et à moitié Glam Rock… Aurais-tu également des influences « Mod » ?

MM : (NDA : sur la défensive) Tu as dit quoi sur le Glam Rock ?!?

ANR : Les Faces étaient à moitié Glam Rock…

MM : Je veux faire un point définitif sur une chose précise : je ne me suis jamais considéré comme « Glam Rock », ni « Glitter », ni « Glam Punk », ni… Les étiquettes sont plus inutiles qu’autre chose… Tu as employé à l’instant le terme « Mod » : considères-tu les Who comme un groupe « Mod » ?!? Les Who sont-ils « Mod » !?!

ANR : Au début, oui. Lorsqu’ils s’appelaient encore les « High Numbers », ils faisaient partie de ce mouvement, mais ils étaient encore très jeunes à cette époque…

MM : Quand-est-ce que le truc « Mod » est-il devenu « Mod » ?!?

ANR : Au début des années 1960, jusqu’à ce que le « Swinging London » apparaisse et mette un terme à ce mouvement, vers 1966…

MM : Right ! Mon opinion est que cette guerre entre les Mods et les Rockers était stupide…

ANR : Pour clore le débat : j’ai d’ores-et-déjà achevé la chronique de « One Man Gang » en vue de sa sortie le mois prochain, et je conclu en écrivant qu’il serait paresseux de te qualifier de chanteur « Glam Rock » : « One Man Gang » est un disque de Rock’n’Roll, point.

MM : (NDA : redevenu bienveillant) : Merci… On m’a systématiquement catalogué « Glam Rock » afin de faire vendre, c’est un truc des maisons de disques… Le Glam Rock était en effet vendeur, notamment aux USA, lorsque nous avons percé avec Hanoi Rocks dans les années 80… C’est fastidieux… Dans les années 50, 60, 70, les gens faisaient de la musique pour faire de la musique… Bullshit ! Je ne fais pas ce métier afin de gagner de l’argent.

ANR : Sur le morceau « Wasted Years », tu renoues avec ta marque de fabrique : l’harmonica. Tu as appris cet instrument avant d’écouter du Rock ? Ou est-ce à cause du Rock que tu t’es mis à l’harmonica ?

MM : Ma Mère m’a tout d’abord inscrit à des cours de piano classique quand j’avais cinq ans. Mon Grand-Père était violoncelliste. Mon arrière-Grand-Père était hautboïste. Très tôt, j’ai été initié à la musique de Jean Sibelius, le compositeur finlandais de musique classique. Puis, j’ai découvert le Rock’n’Roll, lorsque j’ai vu Black Sabbath à la télévision finlandaise en 1970, le concert filmé à Paris…

ANR : A l’Olympia, non loin d’où nous sommes aujourd’hui…

MM : Ouais ! J’ai été fasciné par ce son plein de puissance, et par ce chanteur aux cheveux longs. J’aime aussi tout ce qui va de Little Richard aux Rolling Stones…

ANR : C’est une tendance finlandaise de faire étudier la musique classique aux enfants ?

MM : Pas vraiment en fait. Le piano s’enseignait à l’école quand j’étais petit. Mes frères savent eux-aussi en jouer. Le violoncelle est un instrument plus rarement pratiqué. J’aurais pu devenir musicien classique, même si mon Grand-Père me conseillait souvent d’avoir « un vrai métier » avant…

ANR : Tes racines finlandaises sont présentes dans ce disque. Au moins à trois instants. Le premier est « Helsinki Shakedown »… Peux-tu nous parler du thème de ce morceau ?

MM : C’est à propos des temps morts que tu subis lorsque tu es en tournée. Le public n’en a pas forcement conscience, mais l’on perd un temps fou à attendre, notamment, dans le Tour-bus ou les hôtels. Et l’on cherche tout le temps à s’occuper. On passe d’une ville à une autre. C’est notamment dans ces moments que vient l’inspiration.

ANR : Tu es né à Helsinki. Tu vis toujours en Finlande ? Turku ?

MM : Turku ! Je suis né à Helsinki, j’ai déménagé à Stockholm à l’âge de 17 ans afin de monter un groupe, et je réside à Turku. Je suis parti de rien…

ANR : Le deuxième rappel à ta Finlande natale est l’apparition de ton compatriote le trompettiste de Jazz Tero Saarti, qui vient jouer façon Mariachi sur « Heaven Is A Free State »…

MM : J’ai tout composé moi-même, crois-le ou pas (Rires)

ANR : Deux finlandais qui font un morceau Mariachi qui sonne très « New York », on dirait du Mink DeVille…

MM : Héééééééééé, tu aimes Mink DeVille ?!? Waoooooooh !!! Je prends cela comme un compliment, c’est super !!!

ANR : C’est mon opinion…

MM : Steve Conte, le guitariste de mon groupe, a collaboré avec Willy DeViIlle il y a des années ! J’ajoute que ce morceau, « Heaven Is A Free State », est mon préféré de ce disque. Merci, c’est un grand compliment !!!

ANR : La troisième évocation de la Finlande est la présence du violoncelliste Eicca Toppinen d’Apocalyptica, sur le morceau qui clôt ce disque, « Low Life In High Places »… Mon morceau préféré de ton album…

MM : (NDA : tousse) C’est un de mes préférés aussi…

ANR : De quoi parle « Low Life In High Places » ? De la vie en tournée ?

MM : Notamment. Par exemple, lorsque la maison de disque t’adresse du champagne lors de la phase de promotion. Cela parle aussi d’une certaine dépendance à un système qui te prends en charge : en tant que vedette, tu peux vivre au quotidien dans le luxe et n’avoir rien à toi.

ANR : Si Michael Monroe était un disque, ce serait lequel ?

MM : Le mien : « One Man gang ».

ANR : (Rires) Nous arrivons à la fin de ce très agréable entretien…

MM : …merci…

ANR : …y-a-t-il une question que tu aurais voulu que je te pose ? 

MM : Ahem… Comment tu vas ? (Rires) C’est une très bonne question, on ne me l’avait jamais posé celle-là… C’est vrai, j’ai beaucoup blablaté…

ANR : Merci de le noter (Rires)

MM : C’était très cool : « Es-tu content ? (Rires)

ANR : D’être avec toi : bien sûr !!!

MM : Tu aurais pu me la poser à moi, non ?!?

ANR : Et je serais encore plus content si on pouvait prendre une photo ensemble, et faire travailler la photographe ! Tu étais une de mes idoles lorsque j’avais dix-sept ans…

MM : Great !

ANR : J’étais dans un groupe qui jouait façon les Sex Pistols…

MM : (NDA : intéressé) Hein, hein…

ANR : …Aerosmith, les Stones, Mötley Crüe…

MM : C’est une très bonne combinaison… Pour moi, en dépit des critiques sur le thème « Il ne sait pas chanter », Johnny Rotten est un des meilleurs interprètes de tous les temps. Quel album : « Bodies »… (NDA : se poudre la visage en même-temps, remet ses lunettes de soleil sur son nez, puis se lève) Merci beaucoup, j’ai apprécié, j’espère vous voir le mois prochain à mon concert à Paris… En tous cas, j’espère ne pas t’avoir déçu.

 

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