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Concert de Dizzy Mizz Lizzy à La Boule Noire le 7 juin 2017

mardi/13/06/2017
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Se rendre boulevard Rochechouart un soir de juin 2017 afin de voir un (ou plutôt le) concert du groupe danois Dizzy Mizz Lizzy relève de l’événement. Non pas au sens Grand-Messe du terme : ici point de sponsors aussi crédibles que Nivea, Toyota ou Fun Radio ; ni de distribution de flyers à n’en point finir devant l’entrée ; aucun revendeur de tickets ou de posters imprimés double face (avec la bobine de Rihanna ou Black M invendue au verso) ; nul marchand de merguez et de bouteilles d’eau facturées le quadruple de leur valeur marchande. Non. Evénement au sens : « C’est tout un événement, c’est une grande affaire, une chose inattendue » (Littré). Car y est donné le tout premier concert parisien d’un groupe formé à l’orée des années 1990, lequel a connu l’entière gloire entre 1993 et 1996 au Nord de l’Europe, qui demeure culte dans sa contrée (et au Japon), et s’est reformé l’an passé après quinze ans de silence : Dizzy Mizz Lizzy. DML n’aurait joué qu’une seule fois, à leurs débuts vers 1993, au pays de Norbert Krief ; et encore, Tim Christensen le guitariste-chanteur, s’avoue amnésique quant au lieu. A priori ce serait Niort. Voilà donc pour l’aspect événement.

Juin s’avère être un mois défavorable pour ce type de corrections. En tous cas du point de vue affluence. Aux « événements », coutumiers de ce mois, viennent s’ajouter le Download (deux jours après le présent concert) et le Hellfest (la semaine suivante), lesquels dissuadent malheureusement l’amateur de musique de se disperser. Du coup, La Boule noire n’est pas des plus remplies. Au vu des faciès composant l’assistance (oui, il est utile parfois de fonctionner au faciès…), il semblerait toutefois que la communauté danoise de Paris soit venue prêter main-forte à ses idoles. Beaucoup de quadras en effet, certains en chemise unie impeccable, sortant vraisemblablement de leurs jobs d’expats ou d’agents à la Maison du Danemark, et qui papotent entre eux en buvant des bières. Tout cela donne l’impression de participer à quelque chose de sympathiquement étranger. Un peu comme se rendre à un concert de Vulcain ou de Renaud Hantson à Varsovie, à Edinbourg ou à Lisbonne (plus précisément : des Vulcains ou des Renaud Hantson multi platinés ayant raflé toutes les récompenses nationales) et d’y croiser majoritairement des français. Derrière la batterie de Søren Friis, la photographie Sépia de Vera, la petite fille au regard sévère, qui est en fait la grand-tante de Tim, décédée jeune de la tuberculose, fait office de bannière, et souligne cet arrimage aux racines dansk.

Il est vingt-et-une heure moins quatre lorsque le trio de Valby attaque « Phlying Pharaoh », un instrumental entraînant on ne peut plus Soundgarden-Black Sabbath. L’assemblée s’anime. Suit l’hymne « Forward in Reverse », aux faux-airs de « Cherub Rock » des citrouilles écrasées de 1993. Les bras des premiers rangs se lèvent et oscillent en rythme de gauche à droite (comme dans un « événement » de juin, le stadium en moins). Tim Christensen, visiblement ému, communiquera plusieurs fois avec son public ; lui confessant sa timidité (également constatée, voire éprouvée par votre serviteur en ITW) ainsi que sa joie d’être ici pour la première fois. Si la salle n’est qu’à un tiers pleine, le plaisir de jouer est palpable. Auquel répond la ferveur des spectateurs, massés devant la petite scène. Un peu comme une scène finale d’un film de Thomas Vinterberg (« La communauté », par exemple), qui se déroulerait dans une salle de bal, quelque part non loin de Copenhague. Forte de dix-sept morceaux, la setlist fait la part belle à « Forward in Reverse » leur troisième et dernier album publié l’an dernier (très correct ce « Terrified in Paradise »), ce qui tendrait à démontrer que cette reformation n’est pas uniquement due au caractère élevé des contributions publiques au Danemark… L’influence des Beatles période « Day Tripper » se ressent dans certains canevas (« Love at Second Sight »). Mais c’est l’esprit des années 1990 qui domine cette chaleureuse prestation. Parfois la voix de Tim évoque celle de Michael Stipe de REM. On pense aussi de temps en temps aux Stone Temple Pilots (les chants), voire à Pearl Jam (la Strato et la pédale d’effets de Tim). Le récent « Made to Believe » est résolument grunge FM. L’intro de « Dr Feelgood » du Crüe est (y compris) jouée l’espace de quelques dizaines de secondes, histoire de rappeler que le hard des années 1980 fût la passion première des trois scandinaves…

Sortir afin de s’en griller une, saluer le nombre conséquent d’agents de sécurité, et payer en euros le t-shirt à l’effigie de Vera, nous feront quand-même sortir de cette gentille bulle spatiale et temporelle. Dont on retiendra pour longtemps un esprit d’humilité et de positivité. Il fait encore jour lorsque le premier concert parisien du plus grand groupe de rock FM danois s’achève. Et l’événement de cette soirée de printemps 2017 vient de réparer une anomalie historique.

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