Welcome to Hell(fest)!

mardi/20/10/2015
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Auteur: Johann GUYOT, Sofie VON KELEN

Titre: WELCOME TO HELL(FEST)

Editeur: Editions du Blouson noir

Nombre de pages: 144

Sortie le: 12 juin 2015

Note: 15/20

 

Votre cousin Brandon, qui ne sait achever une phrase par autre chose que « j’avoue », et votre autre cousine Bérénice, qui trouve Frigide Barjot trop dévergondée, possèdent tous deux (et pour des causes différentes) de crasses préjugés sur la musique que vous chérissez depuis le collège. Du coup, l’un est certain que participer au plus grand rassemblement de France consacré à ladite musique est moins dar qu’à une soirée au Metropolis entre soces (ponctué ici d’un « wesh »), tandis que l’autre est persuadée qu’on y célèbre la fin du Monde civilisé (puisque le Père Regimbal l’affirme ex cathedra). Ce manque criant d’objectivité n’est que le produit d’un gap en termes d’informations. Une solution s’impose : leur offrir au plus vite « Welcome to Hell(fest) », un sympathique carnet de route réalisé par Johann Guyot et Sofie Von Kelen, qui rassemble des dessins du premier sur une idée et des textes de la seconde.
Tous deux ne sont pas novices en la matière : le dessinateur n’en est guère à son premier méfait papier, et la narratrice anime des sites Internet traitant de bédé et de musique, elle est également orga à ses heures. Ce livre rigolo est un fourre-tout de textes et de gribouillis, couvrant les pérégrinations des deux amis lors des éditions 2012, 2013 et 2014 du Hellfest. Le dessin est délibérément franchouillard, dans le bon sens du terme. Guyot le plaide en fin de livre (« Nan mais cé paske j’ai trop lu Vuillemin et Reiser alors forcément »), il est vrai que son style est assez proche de celui de Reiser ou de Claire Bretecher. Il alterne en chaque page crobars (pas Crowbar, hein) échevelés et esquisses plus travaillées, toujours en noir et blanc. De l’avis des auteurs, certains sont ratés, notamment celui du Hank III (Lynyrd Skynyrd), « qui ressemble à Julien Clerc ». Le point fort de ce livre est incontestablement la stricte véracité et l’humour avec lesquels Johann et Sofie rendent compte de ces trois éditions. De plus, la préface est signé Corentin Charbonnier, « anthropologue spécialiste du metal, auteur d’une thèse sur le sujet » (très joli texte).
Absolument tout ce qui fait le charme de la manifestation est passé en revue. Des groupes (« le chanteur Georges Corpsegrinder possède le cou le plus gros que j’aie jamais vu », « Bobby Liebling ressemble à Agecanonix… il est très facile à dessiner »), au folklore (les vestes à patchs, le Camping, la fiche technique d’un Mosh Pit , le Leclerc de Clisson…) en passant par les figures incontournables (le type « qui se badigeonne de boue avant les concerts », celui « déguisé en Pepito complétement plein », « cet individu avec un dossard Immortal cousu sur une chemise à fleurs », etc…). On alterne entre les différentes scènes, les deux Mainstage ne sont pas privilégiées, des têtes d’affiches passant à l’as. Les comptes rendus des concerts donnés sur les Altar, Temple et Valley sont en revanche à foison, et assez pointus dans le descriptif. Sofie Von Kelen confesse ainsi à son acolyte son amour pour Doomriders et leur « Heavy-Stoner-Core-Post-Sludge ». On rit beaucoup. Et les deux personnages deviennent de plus en plus attachants au fil des pages et des éditions. Rien ne passe à la trappe, y compris les travers du Fest (l’hygiène, les files d’attentes, les exhibitionnistes, etc…), ce qui fait de cet amusant objet un témoignage honnête. Au pire, vous ferez vous-aussi preuve de cette honnêteté en offrant « Welcome to Hell(fest) » à Brandon et Bérénice, afin de les instruire un peu. Au mieux, vous le garderez pour vous, et pourrez ainsi le relire.

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