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Interview de Pascal Pacaly

mardi/16/02/2021
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Art’N’Roll : Bonjour Pascal ! Peux-tu, tout d’abord, te présenter à nos lecteurs s’il te plaît ?

Pascal Pacaly : Bonjour Romain. Alors, 43 ans, vivant à Saint-Etienne. Issu d’une famille ouvrière, né au Chambon-Feugerolles dans la banlieue stéphanoise. Écriture de premiers poèmes à l’adolescence pour tenter d’expier une adolescence pas terrible. N’a pas arrêté d’écrire depuis. Dévore les livres de tous genres. Apôtre de la culture. Amoureux de la littérature américaine et de New-York. Grand fan de foot et de l’ASSE. Couleurs préférées : l’orange, le rouge, le vert, le noir, le violet, le rose, le jaune… « Vous allez finir par vous aimez les uns et les autres, bordel de merde ? ». Optimiste réaliste, donc pessimiste.

ANR : Tu as publié sept ouvrages chez les éditions du Joyeux Pendu : peux-tu nous les présenter ?

PP : Les ouvrages ? Il y aurait tellement à dire… Je ne saurais pas où commencer ! Mais on va dire que le pilier c’est le rock français à travers et les livres « La France est rock » dont le troisième tome est en cours. Ce sont des rencontres et interviewes d’artistes / groupes de rock français (Les Wampas, OTH, Parabellum, Eiffel, David Vincent, Les Ogres de Barback, etc… etc…) : le but est de raconter leur histoire, leur découverte à eux du rock. Comment ils ont monté leur groupe, la composition des albums, la vie en tournée, les coulisses… Il y a d’autres livres sur le rock, sur les fans à travers « Rock Addictions », ou l’histoire du rock à Sainté… Et puis « Apocalypse mi Amor » dont on reparlera, je crois…

ANR : Tes travaux sont placés sous le signe de la pluridisciplinarité. Tu as suivi quelles études ?

PP : Oui, mais qui n’avaient rien à voir dans celles de l’art : j’ai fait une fac d’anglais tout simplement car je ne savais pas du tout quoi faire après mon bac. Aucune idée à part une envie de commentateur radio de matches de foot ! J’ai tâté un peu de journalisme, mais la vie en a décidé autrement avec la naissance de mes enfants, et l’art est revenu me chercher : j’écrivais déjà, j’écris depuis l’adolescence, mais j’ai franchi un palier avec un premier recueil de poésie très naïf, mais ça m’a mis le pied à l’étrier…

ANR : Quelles sont tes influences littéraires ?

PP : Tout, ou presque vient des USA. Car j’aime qu’un écrivain me parle, pas seulement à travers ses mots, mais aussi à travers sa vie, ses actes, son charisme. Des écrivains comme Tennessee Williams, Bukoswski, Salinger, Mac Cullers m’ont touché par leur anticonformisme… Mac Cullers écrivain en faveur des noirs tout en étant une femme bisexuelle dans un sud raciste et misogyne… Tennessee Williams, lui, était homo, et à travers ses livres, entre les lignes de ses écrits, il les défendait. En France, je ne vois que Sade, Rimbaud et Vian qui me font vibrer…

ANR : Que lis-tu en ce moment ?

PP : Je lis des choses extrêmement variées… Là je viens de finir une biographie de James Dean, tout en lisant le mag’ « So foot », mais je relis aussi « L’attrape-cœur » de Salinger qui m’a mis le pied dans la littérature. C’est l’un de mes livres-clé avec « Justine » de Sade et « Le cœur est un chasseur solitaire » de Carson Mc Cullers, et Bukowski avec « Les contes de la folie ordinaire ». Ces livres m’ont fait basculer dans l’amour de la littérature. Le livre est le savoir. L’histoire est le présent. Car du passé nait le présent : on apprend, on comprend beaucoup de choses qui se passent aujourd’hui dans notre société à travers les livres, à travers l’histoire.

ANR : Et quelles sont les revues, tous styles confondus, que tu affectionnes ?

PP : Il n’y a pas vraiment de revues, si tu parles de magazines : ou alors des trucs de foot ou d’histoire… J’ai quelques centaines de livres chez moi, ça passe du coq à l’âne, des guerres à la géo, du sport à la mystification de l’histoire, des bios, des bds… Du Stephen King, des Strange, du Shakespeare, Poe, de la Mythologie grecque, des livres sur le rock évidemment, des classiques américains… Il n’y a rien que j’affectionne en priorité, c’est un mélange qui fera un tout… Allez si, à la réflexion, peut-être une affection particulière pour la SF et K. Dick ou les trucs post-apocalyptique… Envie et besoin de rêver un monde différent du piètre dans lequel on se trouve…

ANR : L’esthétique que tu développes dans tes écrits mais aussi dans leurs illustrations (nous allons y venir plus bas) pourrait être qualifiée d’essentiellement « Punk »… Quels sont tes goûts musicaux ?

PP : C’est (forcément, hein) intéressant ce que tu dis, car je ne m’étais pas fait la réflexion en ces termes. Car pour moi l’art n’a pas de famille, c’est comme l’humanité, il n’y a pas de races différentes, juste des humains. Bon après oui, ça se rapproche de visuels rock, oui… Ce que j’écoute ? Tellement de choses… De Noir Désir à David Bowie, de Manic Street Preachers à OTH, Parabellum, des classiques 50’s américains, de la soul, de la pop 80’s pour se vider le cerveau et danser. Nirvana aussi, Espen Lind, Merzhin, la liste est sans fin…

ANR : Venons-en à « Apocalypse mi amor » publié aux Editions du Joyeux pendu en novembre 2019, et que tu m’as fait suivre (merci !)… L’ouvrage est sous-titré « Poésie, peinture, dessin, graphisme, Street Art, photo ». Édité en format A4, il consiste en une série de juxtapositions entre un poème en page gauche, et un visuel l’illustrant en page droite : ce qui frappe est la justesse des choix entre chaque texte et chaque image y correspondant. Comment as-tu effectué ces choix ?

PP : Il existe deux autres livres de ce style, sur le même principe, que j’avais déjà écrit. Je savais donc où j’allais, ce que je voulais et ce que je ne voulais pas. Je savais les idées, les thématiques, les écorchures, le passé… J’ai donc recherché des artistes dont j’aimais l’art : j’avais déjà quelques connexions. J’ai également découvert d’autres artistes grâce au net la plupart du temps, et par le bouche à oreille aussi… Ces textes sont très écorchés, à vif. J’aime aller au cœur des choses, sans filtre. Il y a tant d’hypocrisie dans ce monde… Sous la peau superficielle il y a une autre, une vraie peau, et encore dessous, les os qui sont la mort. Mais avant d’arriver aux vers, il y a tout un chemin à faire, parsemé de joies et de douleurs : c’est tout ce qu’exprime « Apocalypse mi amor ».

ANR : La diversité des visuels et des artistes choisis afin d’illustrer tes poèmes marque également le lecteur : ça va d’Éric Débris à Kiki Picasso, en passant par Sabine Frering ou Philippe Cognée… Peux-tu nous en dire plus ?

PP : J’adore tous les styles d’arts : il y a toujours à apprendre, comprendre, découvrir. Avec le net nous avons la possibilité d’engranger encore plus de savoir, alors je ne me gêne pas. J’aime l’idée de mélanger, de variété de genres. Évidemment il y a aussi des choses que je n’aime pas, mais de ce qui me touche, quand je le peux, j’essaye de le mettre en avant. C’est pour cela que je contacte tous ces artistes différents : car leur art me touche, j’y retrouve quelque chose qui correspond à mes attentes, à une envie d’écrire dessus. Avec le temps, j’arrive à avoir un petit réseau d’amis artistes, une chance dont je profite, ce qui ne m’empêche pas d’en découvrir d’autres. Je leur demande s’ils veulent bien participer, et si c’est le cas, c’est génial !

ANR : Dans l’introduction que tu as rédigée, tu décris « Apocalypse mi amor » comme « l’envie, le partage, la rage et le naufrage » : Eros et Thanatos sont très imbriqués dans tes écrits (ainsi que le choix des visuels), non ?

PP : Je ne vois pas ça en termes de dieux grecs, car les dieux grecs sont la représentation (entre autres) de sentiments humains. Ce sont justement ces sentiments primaires auxquels je fais appel. C’est l’essence même de l’humain. Ressentir. Regarder autour de soi et découvrir, comprendre, apprendre. C’est toujours le même schéma. Nous sommes une espèce de passage, et malheureusement, nous n’arrivons pas à vivre en harmonie avec les autres espèces (plantes, animaux) tout simplement car nous nous pensons tellement supérieurs à elles ! Mais nous allons évidemment dans le mauvais sens. En attendant, je m’ouvre à tout ce qu’il y a autour de moi, j’absorbe tout cela et j’essaye d’en faire bon usage…

ANR : Tu sembles proche de La demeure du Chaos : peux-tu nous dire en quoi et comment ?

PP : Qu’il faut absolument la visiter dès que la « covidictature » nous le permettra ! C’est une grande fierté d’être soutenu par une telle structure qui est reconnue et met en avant les artistes alternatifs, entre autres. Il nous semblait en effet que le côté apocalyptique de La demeure et de mon livre arpentaient les mêmes chemins…

ANR : Autre élément : à la fin de ce livre, tu listes les sites Internet des artistes visuels présents… En plus du remerciement que l’auteur leur adresse, le lecteur peut ainsi mieux les découvrir…

PP : Oui c’est logique… C’est le minimum qu’on puisse faire ! Après c’est, comment dire, pas vain… Mais aujourd’hui, il suffit de taper un nom dans Google ou Facebook pour avoir accès à leurs univers. Enfin, ça ne me mange pas de pain de mettre les liens, et si ça peut aider ou faire plaisir, c’est avec le même plaisir !

ANR : Le poème intitulé « Ma came » est illustré par un tableau d’Anne Van Der Linden, une peintre et dessinatrice, qui a été la complice de l’inénarrable Jean-Louis Costes pendant des années… Est-ce un hommage caché à Costes ? Une revendication d’influence de celui-ci en tant qu’écrivain (entre autres) ?

PP : Honnêtement, cela n’a rien à voir… Tu sais, moi, les auteurs français à part ceux que je t’ai cité plus haut… Non, c’est juste que j’ai beaucoup aimé le tableau d’Anne… Rien de plus, désolé !

ANR : Une surprise figure en pages 58 et 59 : un poème intitulé « Innuendo », est illustré par Freddie Mercury à Wembley peint par l’artiste graffeur ardennais L8Zon… Pourquoi cette sympathique mais inattendue référence à Queen et à son chanteur ? La poursuite du spectacle humain en dépit de l’inévitable mort ?

PP : Et pourquoi une surprise ? Ecouter Queen est-il encore si honteux de nos jours ? « Innuendo » est un album merveilleux pour moi. N’oublions pas le contexte, à savoir qu’il allait mourir lorsqu’il l’a composé. C’est donc un testament, avec tout ce que cela entend comme brassage d’émotions. C’est on ne peut plus « pur » : il donne tout, toute son âme, tout ce qu’il a, une dernière fois. Il n’y a plus d’arrière-pensée à avoir, juste dire ce qu’on a été, et ce que l’on est encore pour peu de temps. Cette chanson, « Innuendo », est d’une telle beauté… Écoute-là dans le noir complet et dis-moi que tu ne ressens rien !!!

ANR : Ferais-tu partie de celles et de ceux qui pensent que « Tout est culture » ?

PP : Non, il y a hélas des choses comme les infos, la télé-réalité, enfin, ce sont les premières choses qui me viennent à l’esprit… Il y a par contre TOUJOURS matière à analyser, que ce soient ces mêmes infos… Ou le comportement humain, en période de panique, ou pas… Les émotions, ressentir, agir… L’être humain est quelque chose de formidable et triste à la fois. Une possibilité énorme et une déception qui l’est tout autant. Beaucoup de choses sont cependant culture, mais faut-il encore que les gens changent le curseur : c’est-à-dire passer des réseaux sociaux et médias poubelles aux livres, par exemple…

ANR : Comment perçois-tu, juges-tu, l’évolution de la culture dite « Rock » en 2021, en France et ailleurs ?

PP : Sous la dictature du Covid, c’est fort compliqué de parler d’évolution…. Je parlerais plutôt de survie ! D’après différentes interviewes, d’un côté les groupes sont frustrés, évidemment, mais d’un autre côté ils en profitent aussi pour mettre à jour des choses qui attendaient jusque-là, comme un vieux site web, des pochettes d’album à venir… Des anciennes chansons à retravailler. Mais, fort heureusement, ils composent, encore et toujours, se réunissent toujours en répétitions, même si c’est plus compliqué. L’attente est longue mais la passion est toujours là. On ne peut pas jouer sur scène ? Alors on fait le reste, c’est-à-dire tout ce qu’il est possible de faire. En tout cas, une chose est sûre : aucun ne reste inactif ! Après, une autre chose de sûre : sortir un album en pleine pandémie est un crève-cœur, mais ils ne peuvent pas repousser indéfiniment… Bref, comme tout à chacun, ils s’adaptent…

ANR : Pour finir, quels sont tes projets en cours ou à venir ?

PP : Et bien là je suis en plein dans la mise en page de la « France est rock » tome 3, avec la découverte de nouveaux groupes / artistes, comme Miossec, La Rue Ketanou, Tagada Jones, Loudblast, l’Opium du Peuple et tant d’autres… Encore quelques semaines d’attente !

ANR : Merci Pascal, à bientôt.

Lien ouvrage et vidéo de présentation ci-dessous :

Apocalypse mi amor

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