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Moonspell – « Hermitage »

samedi/13/02/2021
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Auteur : Moonspell

Titre : « Hermitage »

Label : Napalm Records

Sortie le : 26 février 2021

Note :  17/20

Les joyeux lurons de Moonspell avaient marqué 2017 avec leur somptueux « 1755 », un album quasi-concept ayant pour épicentre le tremblement de terre survenu à Lisbonne le 1er novembre cette année-là, les dizaines de milliers de vies et de destins annihilés, la figure salvatrice de l’illustre marquis de Pombal, plus la controverse subséquente opposant sur la fatalité Voltaire à Rousseau (en gros, l’un blâmait un sinistre concours de circonstances, l’autre le choix humain de construire une ville côtière au sein d’une zone sismique). Et recelant ces deux chefs-d’œuvres de composition et d’orchestration que sont « Desastre » et « Lanterna dos Afogados » (le « Phare des noyés »… Oui, ils choient des problématiques aussi proches de celles d’Ultra Vomit que Gaston Deferre ne l’est de la magistrature suprême). Une captation en public intitulée « Lisboa Under the Spell » avait été publiée dans la foulée par ces hommes de noir vêtus (une couleur chez eux, aux dires de la pub Porto Cruz des années quatre-vingt). Les gothiques latins nous reviennent donc ce mois de février, mois où la luminosité tutoie l’obscur et le glacial (joli !).

Leur douzième tourment studio, « Hermitage », a donc l’honneur et pour tâche de clore la période « 1755 ». Moins sombre que son devancier dès la première écoute, il s’ouvre sur « The Greater God », entamé par une douce ritournelle fredonnée par la voix de Fernando Ribeiro, presque une comptine… Le ton est donné. Si le précédent disque naviguait en eaux noires, la couleur de celui-ci tourne à l’ocre. Le chant à dominante moins gutturale que naguère (la voix façon « Cookie Monster » n’est plus omniprésente, Fernando ayant préféré susurrer façon new wave, entre autres sur « Apoptheghmata ») ainsi que la fluidité de la guitare soliste en font foi ; ces dix complaintes ibériques sont truffées de chorus, des fois plusieurs par morceau, sommaires mais redoutablement inspirés voire sensuels. Deux pistes sortent instantanément du bouquet : « All or Nothing », un blues taciturne et suave ; le tempétueux « Hermitage », lequel confirme la règle qui veut que les titres dits « éponymes » soient souvent les meilleurs d’un disque (à l’exception notoire de « Let it Bleed » des Stones, les historiens du rock ne savent pas trop pourquoi…).

La forme est mise au service du fond, il n’y a aucun bavassage instrumental et technique. Ledit fond étant formé par la trame conceptuelle, les atmosphères ainsi que les mélodies, notion presque novatrice en ce siècle autotuné et vain (la presse généraliste, y compris la plus fine, est actuellement en pamoison devant le nouveau Sleaford Mods, démonstration si besoin est de la consomption de l’industrie musicale…). Le thème porte cette fois sur l’isolement ouvrant la voie au surpassement, à l’image de figures historiques appréciées des cinq ténébreux, telles Saint Antoine le Grand ou Robinson Crusoé. Allégorie d’une formation péniblement comparable (hormis avec leurs blackeux cousins hellènes de Rotting Christ, autres acariâtres passés orfèvres dans l’art de l’ambiance). Les tempi sont variés, les arrangements mémorables, la production de classe mondiale. Le piano est convoqué à plusieurs reprises (« City Quitter », lequel clôt délicatement l’opus). Seuls les passages beuglés et l’épaisse guitare rythmique rappellent que le groupe est catégorisé « metal », l’éperdu « The Hermit Saints » étant archétypal de ce que les lusitaniens savent concevoir en cet an de grâce MMXXI. Une réussite supplémentaire.

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