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Interview avec Max du groupe Herrschaft

jeudi/11/07/2019
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Interview avec Max d’Herrschaft

Art’N’Roll : Hormis un Live Report de 2017, où vous assuriez la première partie de Punish Yourself…

Max : (Emballé) … Hou la vache !!! C’était à la Maroquinerie ?!?

ANR : … Oui, à la Maroquinerie en 2017 (NDA : https://www.artnroll.net/home/punish-yourself-herrschaft-maroquinerie-8-decembre-2017/), j’ai vérifié : vous n’avez jamais été interviewés par nos soins. Donc, nous allons tout reprendre à zéro avec un regard neuf : peux-tu nous présenter ton groupe, et te présenter s’il te plaît ?

M : Exactement ! Alors, le groupe s’appelle Herrschaft, il a été créé en 2004 il y a quinze ans. Nous sommes français et nous faisons de l’Electro-Metal. Le fil-directeur est de tenter de restaurer un peu l’équilibre dans le Metal-Indus entre l’Electronica, la New-Wave et la Synth-Wave : des synthés à nappes avec du Metal, le tout sans jamais être trop-trop violents dans la musique, mais un peu quand-même dans l’intention et dans la voix. Je suis Max, un des membres fondateurs et dorénavant le nouveau chanteur du groupe, puisque l’ancien, Ludo, est parti. Le noyau créateur d’Herrschaft, c’est Zoé et moi depuis la fondation. Nous composons l’Electronica et la musique technologique. J’officiais précédemment à la batterie. A compter de 2014, j’ai connu une petite crise d’identité en tant que musicien, et je suis passé au chant, avec l’envie de changer le style des vocaux. Ludo possédait en effet une voix très Black Metal, très aigüe, très agressive, et je n’arriverai jamais à faire cela : ma voix est plus grave, plus Death Metal… Donc, nous ne sommes plus que deux avec Zoé. Et nous venons de publier notre premier album sous cette formule.

ANR : J’ai regardé, et comme tu es un des membres fondateurs tu vas pouvoir m’aider : le mot « Herrschaft » possède plusieurs significations, laquelle est la vôtre ?

M : Notre sens est celui du règne et de la domination. Je sais qu’il existe une signification plus administrative autour du Bourgmestre ; et un sens plus symbolique, plus proche du feu. Mais l’idée d’origine était celle de « notre règne », « Unser Herrschaft », nous nous sommes dits en 2004 que notre tour était venu : celui de régner sur la musique Electro-Metal (Rires) Notre nom est devenu par la suite « Herrschaft » tout court. Et pourquoi nous avons choisi un nom allemand ? Parce qu’il y a beaucoup d’influences allemandes dans l’Electro-Metal, et que cela sonnait mieux, il ne faut pas se leurrer…

ANR : Justement, quelles sont vos influences ? En quelques phrases depuis le début de l’entretien, tu as dû évoquer sept ou huit sous-genres…

M : (Rires) De surcroît, nos influences ont varié depuis 2004, puisque je venais du Black Metal et du Death : avec le temps, je suis devenu Fan de Rob Zombie. Zoé était beaucoup plus influencé par la vague Néo-Metal, notamment par Slipknot. Nos goûts étaient difficilement conciliables, mais nous avons toujours tenté de trouver un terrain d’entente. Herrschaft est très proche de la « Neue Deutsche Härte », le Metal industriel allemand du milieu des années 1990, des groupes comme Eisbrecher, les débuts de Rammstein, les Oomph!… Mais également par sa réponse américaine, avec Rob Zombie. On aime aussi beaucoup Combichrist, qui parvient à mélanger EBM (NDA : Electro Body Music) avec du Metal agressif. Nous nous nourrissons de beaucoup d’influences. Je ne vais pas toutes les citer, mais tu vois un peu l’idée… Mélanger musiques électroniques et rage Metal, mais jamais sur un rythme rapide ou bourrin, nous ne voulons pas sonner comme Fear Factory ! Rester sur un mid-Tempo qui demeure agressif, et qui prend aux tripes.

ANR : Vos costumes de scènes sont ici, ils sont magnifiques, je regrette à ce titre qu’aucun(e) photographe n’ait été en mesure de m’accompagner… Je suppose que ce masque est le tien et que celui-là appartient à ton ami Zoé ?

M : Exactement ! Je suis le bouc noir, et le petit Satan rougeoyant est son acolyte. La ligne graphique d’Herrschaft des débuts a oscillé entre le totalitarisme et l’apocalyptique, nous jouions beaucoup sur le contraste entre le noir et le blanc. Depuis 2004, nos thèmes sont passés du très global au plus personnel, l’âge aidant. Désormais, nous écrivons sur nos tranches de vies, sur tout ce qu’il y a de sale, de crado dans le genre humain, de détestable et en même-temps de satyrique, de cynique et de rigolo. Lorsque cette idée de diable observant l’Humanité avec son adjoint nous est venue, nous les avons imaginés en train de se dire, dépités : « Regarde ! Ils font de la merde, et ils n’ont même plus besoin de nous pour la faire ! ». Nous avons mélangé un côté ésotérique avec un côté plus grand-guignolesque, grotesque, qui nous va très bien. Sur scène, nous jouons beaucoup avec nos personnages, mais Satan ne sera dans notre spectacle qu’une de ces créatures que nous incarnerons, il y en aura d’autres…

ANR : C’est très italien comme approche, venant d’un groupe qui revendique des influences allemandes…

M : (Rires) Oui, c’est ça : la commedia dell’arte. Les deux masques proviennent d’Italie, ils ont été fabriqués par une artiste près de Milan, non loin de Venise. D’ailleurs, tu reconnais bien le style vénitien dans l’aspect de ces masques en cuir, très belles œuvres d’art… Après, je dirais que nous gardons notre côté latin dans notre approche…

ANR : Donc, le 21 juin dernier, vous avez sorti « Le festin du lion », qui est votre quatrième album studio en quinze ans, le premier depuis 2014… Alors, nous revenons au titre de ce disque, lequel est en français, ce qui est assez bizarre, puisque cela ne correspond pas spécialement à tout ce que tu viens de me narrer, notamment sur le Diable et son acolyte… Alors, c’est quoi pour vous « Le festin du lion » ?

M : Nous avons régulièrement inséré des titres en français dans nos disques, surtout dans les pistes bonus. Le choix de la langue française se fait spontanément lorsque nous composons, tel ou tel morceau ne pourra sonner qu’en français… Il s’est avéré ensuite que « Le festin du lion » s’est révélé être lors de l’enregistrement le morceau majeur de l’album, et au moment de lui trouver un titre, « Le festin du lion » s’est imposé comme tel, alors qu’à la base ce n’était pas du tout notre idée de départ… Quant à sa signification : c’est une allégorie du désir, et le lion qui est le Roi des animaux va aller se servir avant les autres, exercer son droit de cuissage… Au final, cette comédie animale n’est pas si différente de ce magma humain chaotique que regardent Satan et son acolyte…

ANR : il y a un titre, en anglais cette fois, qui s’appelle « White Russians »…

M : C’est un hommage au Cocktail du même nom, et surtout à Mika Bleu qui nous quittés en 2016, et qui travaillait dans le milieu du Metal pour le label Seasons of Mist. Un homme influent, ultime, et un fêtard invétéré, doublé d’un être d’une profonde gentillesse, c’était sa boisson favorite, ce morceau lui est dédié.

ANR : Et parmi les dix pistes de ce nouveau disque il y a, ô surprise, un titre qui se nomme « New World Order »… Exactement le même nom que le classique du groupe Indus Ministry en 1992, une de vos influences je suppose, mais pas le même contenu musical… Ce n’est pas donc une reprise de Ministry…. Vous êtes culottés, non ? Un peu comme si Téléphone avait sorti une chanson s’appelant « Satisfaction », mais n’ayant rien à voir avec le standard des Rolling Stones… Je me suis dit, qu’il y aurait deux explications plausibles : soit c’est un clin d’œil sympa de votre part ; soit le champ lexical de l’Indus est tellement réduit, et les concepts tournant tellement en rond, que vous en revenez tous aux mêmes idées…

M : (Rires) NOOOOOOOOOOOOOOON !!! Le thème de notre morceau n’est pas le même que celui de Ministry. Nous aurions pu pousser le vice et aller jusqu’à la nommer « N.W.O. » comme eux… Après, oui effectivement, certains thèmes sont peut-être récurrents dans notre catégorie musicale… Les paroles de ce morceau évoquent un Redneck complétement replié sur lui-même…

ANR : … On revient donc bien au délire de Ministry…

M : Oui, alors je suis d’accord, en effet : j’admets que la boucle est bouclée, avec une forme d’hommage… Mais, ce n’est pas ouvertement un hommage à Ministry…

ANR : Tu as écouté le dernier Ministry, ou pas ?

M : J’ai un peu du mal avec les derniers disques de Ministry. Le dernier, c’est bien « AmeriKKKant », ou un autre album est sorti depuis ? Il est vrai qu’Al Jourgensen fait une fixation anti-Bush et consorts, et cela définit assez bien l’image de son groupe. D’un point de vue musical, je suis plus Fan des Ministry « à l’ancienne ». Je crois que sur ce dernier album, il y a des choses moins pires qu’à une certaine période, je dois l’écouter…. (Rires)

ANR : Ce qui est amusant avec Al Jourgensen…

M : … Oui, il tourne toujours autour des mêmes…

ANR : … Bush Père, Bush Jr, Trump… Si Trump est réélu, il fera un disque là-dessus… Ses thèmes tournent énormément en rond… Au fait, étais-tu au concert de Ministry, il y a un an presque jour pour jour, en juillet 2018 à l’Elysée-Montmartre, avec Treponem Pal et Shaârghot en première partie : un vrai petit festival Indus !

M : Et Shaârghot !!! Non, je devais être en vacances, je crois bien. C’était quand-même très sympa comme date. Pour Ministry, c’était pile la mauvaise époque, celle où Al Jourgensen n’arrêtait pas de tomber sur scène, ce n’était pas très loin de la date où il avait joué quinze minutes avant de tomber dans les pommes…

ANR : … Après, Al Jourgensen a toujours passé sa vie entre deux passages aux urgences… Dans un entretien récent tu as déclaré que la scène Electro-Indus est petite en France… Elle est petite mais très influente, non ?

M : Ha tiens ! C’est marrant que tu me dises cela…

ANR : Si on établit un parallèle avec la scène Electro, celle de la French Touch, on constate que les français sont à l’aise sur les instruments électroniques, surtout s’il n’y a pas ou peu de paroles…

M : Ouais. Peut-être. Nous avons toujours éprouvé de la difficulté à nous exporter. C’est assez dur lorsqu’on vient de France. De plus, l’existence des clans hermétiques, Metal d’un côté et Electro de l’autre, ne nous a pas vraiment aidé dans notre entreprise. Il y a culturellement une difficulté d’acceptation de la musique Metal-Indus en France. A l’international, je constate une reconnaissance en Amérique du Sud, un public en or pour nous, nous possédons d’ailleurs une Fanbase là-bas… Tandis que le marché allemand est totalement fermé, replié sur lui-même, ils n’ont pas besoin de groupes internationaux ou français qui viennent marcher sur leurs plates-bandes. La difficulté pour des formations modestes comme nous est que nous n’avons pas les moyens matériels afin d’organiser de vraies tournées en Amérique du Sud, alors qu’ils sont pourtant demandeurs. Après, ta question évoque l’influence, pas l’audience…

ANR : Il y a de tout en France, de Treponem Pal à vous, en passant par Shaârghot…

M : Nous sommes surtout à un tournant de l’histoire de cette scène, grâce à un jeune groupe dynamique comme Shaârghot, grâce aussi à un groupe déjà plus ancien comme Punish Yourself, qui est toujours resté, qui n’est jamais mort, qui a toujours réussi à fédérer les autres, et qui avec les années passées permet de refédérer la suite… Avec ces têtes de pont, je pense que nous attaquons une nouvelle période, celle où la musique Metal-Indus redevient à la mode… Le dernier Hellfest est quand-même très représentatif de cela : la scène Electro-Indus y était très représentée cette année. La traversée du désert que notre genre musical a connu est finie…

ANR : Elle a duré de quand à quand cette traversée du désert de l’Indus français ?

M : Les années 2000 en gros. De la fin des années 1990 à 2010, ça a été dur.

ANR : L’effet des modes Néo-Metal et Metalcore peut-être ?

M : Je ne sais pas…

ANR : Parlons du public… Quel est le public d’Herrschaft ? Même si je devine qu’il est composite, il ressemble à quoi ?

M : Notre public à nous ?

ANR : Je crois savoir qu’il y a plus de filles que parmi d’autres publics…

M : PEUT-ÊTRE ! Ce qui est bien, c’est que notre public est assez représentatif du public Metal d’aujourd’hui en général, c’est-à-dire qu’il y a des personnes désormais assez âgées, des vieux brisquards, qui sont contents d’avoir découvert un nouveau groupe, et des plus jeunes, parfois leurs propres enfants. Il est très hétéroclite, ce que nous avons eu la joie de constater, lorsque nous avons joué lors d’une soirée au Hellfest Cult en mars dernier. Donc cela fait plaisir. D’ailleurs, nous avons plusieurs dates de bookées à l’automne, dont une à Nantes au Warehouse le 1er novembre, avec Punish Yourself, OST, Front et Shaârghot : c’est le Kinbaku Matsuri, un festival qui va encore bousculer les genres ! Sinon, nous n’avons pas de tournée de prévue, uniquement des dates programmées de façon régulière afin de faire parler de nous…

ANR : Une question qui peut paraître indiscrète : quelles sont vos professions respectives ?

M : Zoé a de la chance, il est ingénieur du son, il possède son studio, il fait beaucoup de prestations sonores, il est à fond dans la musique qui est sa raison de vivre. Je suis directeur informatique, donc un truc qui n’a rien à voir (Rires) Après, ce n’est pas inhabituel dans le milieu du Metal d’être informaticien… Tu sais, il y a un choix financier à faire à un moment donné. Et puis, il faut prendre cela comme un loisir : j’ai le loisir de faire de la musique de manière sérieuse sans avoir à crever de faim si notre album ne se vend pas, et cela me permet surtout de faire exactement la musique que je souhaite.

ANR : En bientôt seize ans de Herrschaft, quelle est la première partie que tu as préféré faire ?

M : La première partie, hein ? Pas date comme tête d’affiche ?

ANR : Nan, c’est tout aussi révélateur… « Dis-moi qui tu fréquentes, je te dirais qui tu es »…

M : Je dirais que la date de remplacement qu’on a fait pour Punish en 2017, et que tu évoquais tout à l’heure, était un grand moment. De plus, entre Punish Yourself et nous, cela avait été jusque-là un acte manqué : pour une fois que nous pouvions jouer ensemble sur la même scène à la Maroquinerie. On a d’ailleurs remis cela au Réacteur quelques temps plus tard. J’ajoute que quand j’étais gamin, j’allais voir Punish à Bordeaux, tu comprends… Ce groupe a vraiment été une influence MAJEURE pour moi, le fait de jouer pour eux quelques années plus tard fut formidable !

ANR : Vous êtes une formation aux influences composites. Si tu avais le choix entre assurer la première partie pour Obituary, la première partie pour Carpenter Brut, ou la première partie pour Ministry, tu choisirais laquelle ?

M : Ho putain ! Parce que lorsque je pense à Obituary, je pense au groupe que j’écoutais quand j’étais jeune, au début des années 1990. Je ne sais pas ce que ça donne maintenant…

ANR : … Il est un peu fatigué, mais c’est toujours bien…

M : … J’étais très-très Fan d’Obituary : si on me proposait de choisir, je te dirais, je pense, Obituary… Carpenter Brut, c’est bieeeeeeeeeen, mais je pense que tôt ou tard on se retrouvera avec eux sur la même scène… Ministry, il y a ce petit côté où… J’A-DO-RE-RAIS faire la première partie de Ministry… Mais il y a désormais un aspect trop facile chez eux… Pourtant ils ont assuré au Knotfest en juin dernier… Je reste donc sur mon choix de faire la première partie d’Obituary. Cela n’aurait rien à voir musicalement avec nous, mais c’est un groupe qui m’a influencé quand j’étais jeune.

ANR : Tu voulais voir quels groupes au Hellfest ? Et tu as vu lesquels ?

M : Je voulais TOUT voir au Hellfest ! Et j’en ai raté beaucoup, parce que nous étions là-bas afin d’assurer la promo de « La part du lion ». Je voulais d’abord voir Manowar, car j’avais vachement apprécié leur prestation en 2009… Et je fais partie des gens qui ne sont pas du tout dérangés par le côté Kitsch de Manowar, j’adore ce côté rigolo, j’apprécie le groupe pour ce qu’il est. Je voulais également voir Tool, le retour de Tool : la musique était très bien mais, en revanche, le visuel étriqué genre « J’me cache » m’a ennuyé… Le reste du Hellfest cette année a été très démonstratif, alors Tool qui arrive à la fin dans la pénombre, ça fait un peu effet « douche froide ». Ensuite, le groupe que je n’avais jamais vu en concert, et que je voulais absolument voir, c’était Ultra Vomit : donc, j’ai méga-kiffé Ultra Vomit !!! Bien entendu, il y avait aussi Gojira par-derrière le même soir, donc c’était la classe !!! J’ai loupé No one is innocent, puisque lorsqu’ils ont joué nous étions en pleine promo à l’autre bout du site : je pense avoir loupé beaucoup, car tout le monde m’a dit que leur concert était un truc de malades… Sinon, j’ai vraiment aimé Rob Zombie. Parce que justement c’était du bon Rob Zombie. Lui-aussi connaît ses instants un peu fatigués : là, j’ai trouvé qu’il a fait vraiment le taf, et que les membres de son équipe, à commencer par John 5, étaient contents de jouer. En revanche, j’ai été très déçu par Emperor. Et je pense que beaucoup de spectateurs aussi, ce n’était pas du tout au niveau de leur superbe prestation de 2008.

ANR : Et pour finir, quelle est la question que l’on t’a le plus posée aujourd’hui ?

M : C’était « Pourquoi six ans entre votre dernier album et celui-ci ? »…

ANR : T’as vu, je ne te l’ai pas fait…

M : Oui, c’est gentil…

ANR : Merci Max.

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