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Ministry – Shaârgot – Treponem Pal à l’Elysée Montmartre le 13/07/2018

lundi/23/07/2018
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Balade estivale sur les bords de l’Indus ce vendredi 13, avec pas moins de trois formations emblématiques de la scène, et de la Seine puisque l’affiche alignait aux côtés des immenses Ministry deux groupes franciliens : les vétérans de Treponem Pal ainsi que les peinturlurés Shaârgot. Les Finlandais de Grave Pleasures, initialement gravés au fronton de l’affiche s’étant décommandés (pour des raisons logistiques et financières), il revenait donc à Marco Neves et les siens d’ouvrir la soirée sur les coups de 18 heures 48 (précision industrielle) devant une salle à 1/40e remplie. « Il y a quinze ans, c’était bien plus violent que ça, c’était patates dans la gueule dans la fosse… » Narre un spectateur au vigile soucieux d’en savoir un peu plus de l’affiche. Deux Gu Gu Gamno (mais oui, le petit poulet pétomane Japonais !) géants surplombés de toupets blonds, façon Donald Trump, et arborant tous deux une Swastika barrée, ont été disposés par les roadies de Ministry de part et d’autre de l’estrade.

Le Sample de « We want the World… and we want it now ! » hurlé par un désormais très lointain Jim Morrison accompagne l’entrée des musiciens de Treponem Pal ; Marco salue placidement l’assistance, lunettes noires et foulard coloré retenant ses Dreads. Le quinquagénaire chanteur, lequel ressemble désormais à un Mix réussi entre Charlélie Couture et Phiphi, le videur dans Sex Machine, pose sa voix gutturale sur un premier Beat saccadé. Statique, ses bras sémaphoriques, enjoignent les premiers rangs de se remuer un peu. Sans suite. Non pas par mépris du charismatique Frontman, mais plutôt par souci de ne point louper une miette de la prestation. Hormis deux gamins casqués qui sautillent en rythme devant les barrières, les t-shirts et les Look du quadragénaire public trahissent une passion pour le genre. Actif depuis 1986, Treponem Pal est incontestablement le plus grand groupe d’Indus Français, la statue du Commandeur en la matière. Laquelle montre le ciel à chaque phrase prononcée. Le son de la guitare de Polak est indubitablement Rock’n’Roll, à une encablure de celle d’un Motörhead.

A l’entame de leur troisième morceau, « Pushing you too Far » sorti en 1993, la mayonnaise Treponem prend : les gens commencent à crier, et le chanteur avance ses deux bras vers eux. L’ambiance Mid-tempo dansante et un peu psyché évoque étonnamment la scène de Manchester, les Happy Mondays surtout. Franche ovation. Le charismatique troubadour salue la foule façon Bouddhiste (à la Tai Luc donc). Les lumières sombres laissent place à la couleur sur les quatrième et cinquième ritournelles, et la théâtralité de Marco Neves devient évidente. On a juré entendre « Merci Marseille » (?!?), puis arrive « Planete Claire », la superbe reprise des B52’s envoyée sous une lumière bleutée, démontrant si besoin est la richesse des influences de Treponem Pal. Claire comme l’eau de la bouteille en plastique que le chanteur a rapporté des coulisses. Les notes et le chorus de synthé de Kate Pierson sont joués à la guitare. Le Set s’achève par une danse déstructurée de l’ogre chamanique. Ordo ab Chaos : c’est une enceinte presque pleine qui acclame ses anciens.

L’Equipe aurait pu titrer « La marche est-elle trop haute ? ». Car passer après Treponem Pal s’avère à première vue délicat pour leurs cadets Electro-Indus de Shaârgot ; tant pour une logique que l’on qualifiera de « protocolaire », que pour des raisons purement soniques. Et bien non. Puisque les hommes enduits de noir et de vert fluo avaient semble-t-il pleinement conscience de passer après un monument national et d’ouvrir dans une salle prestigieuse pour une institution mondiale. Ils vont tout donner. Et toute la populace va danser. Le volume sonore, qui a doublé, va les y aider. Comme le disent ses membres, la finalité de Shaârgot n’est en aucun cas de révolutionner le monde musical, mais de donner un moment de plaisir… et de défouloir ! Le public le sait et se masse tout devant. Nappes de synthé et assistance en transe.

Shaârgot a ceci d’intéressant qu’il s’agit peut-être de l’unique groupe Français à pratiquer (avec réussite) le Grand-guignol. Par chez nous, on n’aime pas trop se déguiser lorsque l’on monte sur les planches, car on pense y perdre en crédibilité quelque part. On a beau chercher, peu de groupes ont assumé avec autant de Brio le grimage nihiliste. Shaârgot s’en fout allégrement : au Pull camionneur, il préfère enfiler le costume futuriste façon Mad Max / Orange mécanique tombé dans un baril de pétrole. Une sorte de Grand orchestre du Splendid produit par Trent Reznor et jouant du Punish Yourself, Marilyn Manson et (surtout) Rammstein. La guitare du baraqué Brun’o Klose projette un Laser vert, qui vient s’écraser contre le blanc plafond de la salle, puis crache de séminales étincelles. Une sorte de goule géante munie d’un encensoir, toute droit sortie de la planète Tatooine ou d’un épisode des Mondes engloutis, se fait rosser à terre. Un bidon est jeté dans la fosse et passe de mains en mains. Sur le strict plan musical, nos gais-lurons assurent : quel plaisir de voir le batteur Olivier Hurtu (Jesus Volt, Teleferik) à l’aise sur des bandes. Ce joyeux Big Bazar (sans Michel Fugain) évoque aussi les Béruriers noirs. Sur un son à la Depeche Mode, le chanteur achève un interminable Slam, qui l’emmènera jusqu’aux portes de l’Elysée-Montmartre… et noircira moult mimines à son passage.

20 heures 25, revoilà le Monstre. Après avoir vaincu la mort à plusieurs reprises (dont un soir de juillet 1996 dans un hosto de l’Est de la France), Al Jourgensen s’est trouvé un nouvel ennemi à sa taille : Donald Trump. Le 45e président des États-Unis d’Amérique est donc dans le collimateur du plus barré des artistes contemporains, comme en atteste le titre du quatorzième Opus de Ministry : « Amerikkkant », lequel ne fait pas référence à un voyage Outre-Atlantique du grand penseur de l’Aufklärung (qui d’ailleurs n’a jamais quitté sa Prusse-Orientale), mais aux dérives politiques, culturelles et sociales actuelles des USA. A ce titre, les Samples de la voix de Trump, jalonnant la quasi-totalité du Set, ne sont pas sans évoquer celles de son prédécesseur, feu-Georges Bush Senior dans le classique  « N.W.O. » (« New World Order ») en 1992, joué vers la fin du concert. Bref, Jourgensen n’aime pas le droite Yankee, et le fait savoir depuis vingt-cinq ans (Gimmick ?). Cessons-là toute interrogation métapolitique, et n’entravons pas le plaisir : Ministry est avant tout un excellent groupe, pourvu d’authentiques Rock Stars telles le guitariste Sin Quirin (aux faux-airs de Paul Stanley), du clavier John Bechdel (qui ne dépareillerait pas dans Depeche Mode), du trapu bassiste Casey Orr (un compromis entre Kerry King et Kirk Windstein), voire du batteur Aaron Rossi (qui ne dépareillerait pas dans Arch Enemy). Al Jourgensen est en terrain conquis et il le sait, les deux groupes précédents ont chauffé le public comme rarement en 2018, et un concert de Ministry a quelque chose de lourdement spirituel voire sacré.

C’est le récent « I Know Words » qui ouvre le bal / tribune politique de ce soir. Sur les quatorze brulots exécutés, six sont extraits d’« Amerikkkant », ce qui va donner une très forte coloration anti-Etablishment au Set. Le survivant Jourgensen les introduit par une petite diatribe. Une fois par « C’est la Coupe du Monde de la France » (ce qui prouve qu’à défaut d’être appréciés les résultats des Bleus sont connus du chanteur), une autre sur le pouvoir de la Presse. Par instants, le chamanique Al fait penser à Jaz Coleman avec qui il partage certains traits de caractère (et de génie), et qui s’est produit en ces lieux il y a un an et demi avec Killing Joke. Quoique sur scène, Al Jourgensen est souvent plus badin que son homologue Anglo-Indien. Presque cabotin même. Arrimé ou non à son sculptural pied de micro (un squelette de rapace géant, ou de ptérodactyle, rehaussé d’un crâne humain), muni d’une guitare crème en forme de larme (la même que Brian Jones) ou d’un mégaphone, il grimace et vit les paroles de sa musique. Tel un mime maléfique, tantôt courbé comme un bossu, tantôt raide comme la Justice, il joue avec les yeux de ses Fans. Lors des deux derniers morceaux (« So What » et « Bad Blood »), le multiperçé-multitatoué va littéralement se battre avec ces pauvres Gu Gu Gamno gonflables. Il y a fort à parier qu’ils ne finiront pas la tournée à ce rythme-là (le 21 décembre prochain au Fonda Theatre de Los Angeles). En conclusion, si Donald Trump (dont on a admiré la bouille sur grand écran pendant près de deux heures) peut dormir tranquille, la soirée fût réussie (magnifique même) sur le boulevard Rochechouart. Heureusement il y a l’Indus (déjà faite, je sais).

 

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